22 déc. 2013

Les 5000 Doigts du Dr. T. de Roy Rowland (1952)



Alors je vous préviens de suite. Contrairement à ce que le nom du film pourrait suggérer, il ne s'agit pas d'un porno. C'est même tout le contraire. Aujourd'hui je vais vous parler d'un film pour petits et grands, empli de poésie et d'onirisme. Tout le contraire d'un porno en somme.

Les 5000 Doigts du Dr. T. nous narre l'histoire d'un petit garçon, Bart, qui préfère rêver que de s'exercer au piano. Ceci exaspère évidemment sa mère et son professeur, le terrible professeur Terwiliker, joué par le talentueux Hans Conried. Bart considère que ce dernier a hypnotisé sa mère puisqu'elle l'oblige à pratiquer une activité qu'il déteste au lieu de le laisser jouer au base-ball avec son chien, ou parler à son seul ami, le gentil plombier : August Zabladowski. Pourtant il tient à lui faire plaisir car cette mère inattentive est tout ce qui lui reste. Mais malgré ses efforts, le jeune Bart se rendort et se retrouve dans un monde terrible : un camp de concentration pour 500 jeunes pianistes qui devront jouer pour le Dr T. sur un gigantesque piano capable de faire gigoter 5000 doigts sur son immense clavier (et bim une explication du titre, une).

Comme vous pouvez le constater, il y a un renversement de situation et de genre dans ce film. Nous passons d'une simple histoire d'un petit garçon désobéissant à un voyage onirique. Cela ne vous rappelle pas quelque chose ? Un film que tout le monde connaît. Avec un lion. Un épouvantail. Un homme de fer blanc. Une cité d'émeraude. Voilaaa : Le Magicien d'Oz ! Les 5000 Doigts... est le digne successeur du chef-d’œuvre de Victor Fleming. Mais n'allez pas croire que le script est une pâle copie. Oh que non. Il y a plusieurs différences notables. Contrairement au film classé au Registre International Mémoire du Monde de l'UNESCO (si c'est pas la méga classe ça), Les 5000 Doigts... nous plonge directement dans le rêve de son personnage principal. Nous savons que ce que nous voyons n'est pas la réalité du jeune Bart mais une élaboration onirique de ses peurs et espoirs (bien qu'il y ait un twist final qui brise les frontières entre le rêve et la réalité). Le film a même une introduction qui se révèle être le premier rêve de Bart où il se fait pourchasser par des hommes armés de filets à papillons. Le ton est posé. Les 5000 Doigts... est l'enfant du Magicien d'Oz et de Alice au Pays des Merveilles. Le non-sens et l'absurde s'entremêlent avec la poésie et l'imaginaire. Est-ce si étonnant lorsque l'on sait que le scénario a été écrit par le Dr Seuss en personne, l'auteur du Chat Chapeauté et du Grinch ? A l'instar de Lewis Carroll, cet homme a pris une pincée d'idiotie, une cuillerée de chimère, et les a incorporées dans ses œuvres pour en faire des piliers de la littérature de jeunesse et de la poésie. Car il ne faut pas oublier que ses textes n'étaient pas en prose mais bien en vers. Si dans Les 5000 Doigts..., les rimes sont oubliées dans les dialogues, on peut les retrouver dans les multiples chansons qui jalonnent le film. Et oui, chers lecteurs, c'est un film musical, genre typique des années 50.

D'ailleurs, si l'on omet le côté surréaliste du rêve, tout est typique dedans. On pourrait le qualifier de manichéen. Et même carrément de film classique dans le sens péjoratif. Voire un peu réactionnaire pour nous, spectateurs bien trop jeunes pour avoir connus La Seconde Guerre Mondiale et qui vivons dans une société où tous les êtres humains sont libres et égaux en droits (du moins un peu plus que dans les années 50 où beaucoup de préjugés faisaient office de lois). Si l'on regarde bien la trame du scénario, nous nous apercevons que nous avons l'histoire d'un jeune garçon qui se bat avec son ami prolétaire pour déjouer les plans du méchant bourgeois et pour sauver la princesse enfermée dans une tour afin qu'elle échappe au pouvoir du méchant bourgeois et épouse le gentil prolétaire. Pour vaincre cet ennemi redoutable et s'échapper du camp de concentration, le gentil prolétaire et le jeune garçon utilisent... une arme nucléaire... Quand je vous disais que c'était ultra classique comme scénario ! Aaaaah les années 50. Même si je m'arrache les cheveux lorsque je regarde vos productions en décontextualisant, je vous adore. Avouons-le, ce film est bourré de maladresse. Le seul personnage féminin est l'archétype de la faible femme enfermée qui ne peut rien faire sans l'aide d'un homme (et qui accepte d'ailleurs sans broncher de devenir l'épouse du gentil prolétaire comme lui ordonne son fils) (mais bon sachant que Peter Lind Hayes et Mary Healy étaient mari et femme dans la vraie vie, cela se comprend qu'elle ne rechigne pas), le seul acteur noir joue le personnage le plus flippant du film : un liftier aux doigts particulièrement longs, au casque bien trop angoissant, qui énumère les sévices proposés à chaque étage du donjon.

Et pourtant... Malgré cela, ce film est l'un des plus beaux et l'un des plus enthousiasmant que j'ai pu voir.

Rien que pour les chorégraphies. Et en particulier deux. Je vais sans doute exagérer un tantinet, mais je considère ces deux chorégraphies comme étant Les Meilleures Chorégraphies Cinématographiques de l'Histoire du Cinéma ! Et je peux le prouver.
Tout d'abord, la chorégraphie du combat d'hypnose.

 De un c'est très drôle. De deux c'est minutieux. De trois, c'est une EXCELLENTE idée ! Je vais quand même développer. Le Dr. T. tente d'hypnotiser Zabladowski afin que celui-ci arrête de perturber ses plans machiavéliques. Il se lance alors dans une danse proche du tango avec le plombier qui suit non seulement ses pas mais aussi le mouvement de ses mains et de ses doigts. Ce que le Dr. T. ne sait pas c'est que Zabladowski est un autodidacte en matière d'hypnose et le combat en lui faisant effectuer les mêmes pas de danse. Outre son potentiel comique, cette chorégraphie prouve non seulement les talents de Hans Conried et de Peter Lind Hayes en tant qu'acteurs complets, mais aussi que Les 5000 Doigts... est un film basé sur l'illusion et sur les rapports de force. Cette simple danse est en réalité une métaphore de la lutte des classes ! Prolétaires de tous les pays, unissez-vous !
Quant à la deuxième chorégraphie (qui n'est pas sur Youtube), ce n'est pas en tant que métaphore qu'elle détrône toutes les autres qui ont pu être montrées au cinéma mais car elle est emplie d'idées visuelles toutes plus excellentes les unes que les autres. Je contextualise. Bart s'échappe et se retrouve dans la geôle où sont détenus tous les musiciens non-pianistes. Ceux-ci se lancent alors dans un numéro musical présentant tous les instruments du monde. Mais attention ! Les instruments proposés ne sont pas ceux de notre monde. Ils sont modifiés, transcendés. Et les musiciens eux aussi semblent transformés dans ce rêve, ils fusionnent avec leur outil et deviennent des être hybrides, mi-hommes, mi-instruments. Les percussionnistes deviennent des boxeurs qui jouent leur musique avec leurs poings, les saxophonistes ressemblent aux éléphants roses dans Dumbo, les xylophonistes ont du inspirer les Monty Pythons tant cela rappelle le sketch de l'écraseur de souris... Ce grand numéro musical propose plusieurs scénettes qui font de cette scène une immense chorégraphie en l'honneur de la Musique. C'est un enchantement auditif et visuel qui rend hommage à tout ceux dont la Musique est devenu un travail.

Les 5000 Doigts... malgré ses défauts fait partie de ces œuvres qui tombent bien trop vite dans l'oubli populaire. A sa sortie les critiques furent belliqueuses, le Dr Seuss lui-même renia ce film, et pourtant le public suivit et je suis persuadée que dans ce public se trouvait des gens comme Tim Burton ou Terry Gilliam qui, sans le savoir, ont été influencés par ce film. L'émerveillement face aux idées graphiques, que ce soit les décors ou les costumes (l'habit que porte le Dr. T. pour l'inauguration), face à la mise en scène rappelant des chefs-d’œuvres de la littérature ou du cinéma (Bart qui se sert de son T-shirt pour en faire un parachute à l'instar d'Alice avec sa robe lorsqu'elle tombe dans le terrier du lapin blanc par exemple), face à l'absurde de certaines scènes et de certains dialogues qui est finement contrebalancé par la poésie et la beauté de l'imaginaire enfantin... C'est un film à voir au moins une fois dans sa vie car il insuffle une certaine gaieté dans l'âme et ramène les plus aigris vers un âge où les choses simples de la vie étaient vues sous un angle merveilleux.

Et pour les plus sceptiques la musique est de Frederik Hollander qui a composé les bandes originales de L'Ange Bleu de Josef von Sternberg avec Marlene Dietrich, le directeur de la photographie Franz Planer a aussi travaillé sur Diamants sur Canapé de Blake Edwards et sur 20 000 lieues sous les Mers de Richard Fleischer.

Il est aussi l'un des films préférés de Jello Biafra (ancien chanteur des Dead Kennedys), il a inspiré Matt Groening pour son personnage de Tahiti Bob dont le véritable nom est Bob Terwiliger et qui est la Némésis de Bart, Mr Bungle a fait une reprise de la chanson Third Floor Dungeon lors de ses concerts, et il vient de sortir chez WildSide !  

21 déc. 2013

Toulouse Game Show 2013


Et oui mes lecteurs adorés je suis de retour! Un diplôme en poche qui plus est! Vous pouvez désormais m'appeler Maître. Trêve de galéjades, je reviens pour vous offrir une chronique réalisée pour Geek Sans Modération , une bande de podcasteurs avec qui je collabore désormais. Alors avant de retourner aux critiques de films (dont une très prochainement), j'espère que vous apprécierez ma découverte du TGS.



Le TGS c’est quoi ?

Déjà, ça veut dire Toulouse Game Show. Donc comme tu t’en doutes, cela se passe à Toulouse et cela traite de jeux et de spectacles. Mais concrètement, le TGS qu’est-ce qu’on y trouve à l’intérieur ?
On y trouve du cosplay, des mangas, des comics, des stands de rétrogaming, du cosplay, des stars du web, des dessinateurs, des effets spéciaux, du cosplay, des conférences, des web séries, des stars américaines, du cosplay, des épisodes de séries inédits, des gens, du monde, beaucoup de monde, TROP de monde et…du cosplay.
Peut-être que je suis en train d’exagérer un chouia pour le cosplay, mais il faut me croire ami lecteur (ou amie lectrice, je suis pour l’égalité) : c’est la fête du slip (ou de la culotte donc) pour les pratiquants de cette coutume.
(Bon ça va être relou de tout mettre au masculin ET au féminin, donc ami lecteur si tu veux changer de genre, n’hésite pas à corriger dans ta tête mon texte)


Au TGS, le cosplay est roi. Il doit bien y avoir 15 stands qui vendent des costumes, des accessoires, des lentilles de couleurs pour les yeux, des sabres, des perruques, des goodies… Tout pour satisfaire le fanboy (ou la fangirl) qui sommeille en chacun de nous. Et là, cher ami lecteur éclairé, tu me diras :
« Hé dis donc Harley Quinn (c’est moi), tu te foutrais pas un peu de ma gueule quand même ? Tu m’as dit au tout début de ta chronique que le TGS ça parle de jeux ! Et pour l’instant, mis à part un anglicisme sur le fait de jouer à de vieux jeux vidéos, y en a que pour le cosplay ! »


Et cher ami lecteur, je suis fière de toi ! Oui tu as remarqué que le G de Game est peut-être mal choisi. Il faut avouer que des jeux… il n’y en a pas tant que ça. Quelques bornes d’arcade, deux stands Xbox One (aucun stand PS4 par contre), deux ou trois petits stands pour découvrir des jeux de plateau (dont l’excellent Zombicide), des ordinateurs pour jouer à Wakfu (aucun pour jouer au Démineur. Même en mode hardcore), la présence de Yoshihisa Kishimoto (créateur de Double Dragon), de Paul Cuisset (créateur de Flashback, Fade To Black…) et de Eric Chahi (créateur de Heart of Darkness, Another World…) Pas grand chose. [mais quand même du très lourd]

On peut dire que le Jeu Vidéo était surtout à l’honneur du fait de la présence de nombreux journalistes spécialisés dans ce domaine comme Julien Chieze, Marcus, Alain Huygues-Lacour ou encore Yvan West Laurence.
Le Game du TGS est donc en lien avec la presse et avec les joueurs découverts sur Youtube (je ne citerai pas tous les invités ayant un rapport avec Minecraft, il y en a trop et leurs noms sont tous alambiqués), et non en lien avec ceux qui ont permis d’avoir des produits vidéoludiques de qualité. Cela aurait pu s’appeler Toulouse Cosplay Show ou Toulouse Japan Show pour mieux coller avec le contenu.



Mais attention, n’allez pas croire que le TGS c’est de la bouse, ah non ! On s’amuse bien là-bas, pas trop en tant que gamer certes, mais on s’amuse !
Il n’y a pas beaucoup de jeux vidéos mais il y a du contenu ! On a eu droit à des conférences toutes plus déjantées les unes que les autres avec de grands moments de n’importnawakesque. Entre Simon Astier qui entend son équipe parler de la taille de son sexe au public pendant dix minutes, l’équipe de N00B qui fait des surprises, celle du Visiteur du Futur qui fait un concours de bras de fer, Jeremy Bulloch (aka Boba Fett) qui se prend pour son personnage : le public du TGS a pu s’éclater tout en découvrant des épisodes inédits, en ayant des réponses à ses questions, dans la joie et la bonne humeur.

Et puis bon, il faut avouer que dans ce type de conventions, l’émerveillement est à chaque coin de stand. Les costumes de certaines personnes étaient merveilleux (et pas que ceux des concours attention), le stand d’Ankama ressemblait a un village tout droit sorti d’un jeu Zelda (ou de Wakfu bien sur, mais je préfère Zelda), au détour d’une allée (ou dans le coin presse), on pouvait entendre la voix française de Morgan Freeman (Monsieur Benoît Allemane) appeler son chien Snoopy (véridique), ou entendre un tonitruant « NUAGE MAGIQUE !! » lancé à plein poumon par Madame Brigitte Lecordier, LA voix de Sangoku ! Et surtout, il y avait des segway, sortes de trottinettes chelou du futur qui ont bien fait marrer l’équipe d’Hero Corp (et baver d’envie tous les festivaliers qui en avaient marre de marcher). Je tiens à préciser que ces machins sont impossibles à voler car oui, il y a une alarme dessus. Et comme tu peux le constater cher ami lecteur, ici nous testons tout pour toi. Y compris le vol de trottinettes du futur. Ne nous remercie pas, c’est notre métier. Cela permet de compenser le fait que nous ne pouvons rien dire concernant la conférence de presse des stars américaines : Kristian Nairn (Hodor), Jeremy Bulloch (toujours aka Boba Fett) et Kenny Baker (R2D2). Et pourquoi avons-nous failli à cette mission ? Et bien je vais te le dire cher ami lecteur !
Je ne pourrai pas te parler de la conférence presse des stars américaines puisque nous n’avons pas réussi à vaincre le boss qui gardait l’entrée du donjon parking réservé à la presse puisque celui-ci était persuadé qu’il n’avait pas le droit de nous faire rentrer. Par sa faute, on a du se garer à une demie-heure de l’entrée et donc louper la conférence que je ne voulais surtout pas rater (merci monsieur le gardien, ton excès de zèle a accru ma colère).
Mais bon tant pis, nous avons quand même pu interviewer pas mal de gens super cools qui officient dans diverses contrées de la geekosphère, on a pu avoir de belles images malgré la mort d’une de nos caméras (Adieu GoPro avec écran, je t’aimais bien), rencontrer des gens excellents (un petit coucou aux collègues de Federation of Geek), et, malgré la pénurie de café, l’équipe de petites mains du TGS est l’une des plus sympathiques et souriantes que j’ai pu rencontrer.

En résumé, le TGS n’a pas réussi à contenter les gamers mais son contenu reste toujours aussi sympathique ET l’agencement de l’espace était largement meilleur que l’année dernière ! Il fallait toujours attendre près de 4 heures pour avoir une dédicace de stars du web comme Antoine Daniel ou Mathieu Sommet, mais ces files d’attente ne se mélangeaient pas aux masses grouillantes qui erraient d’une allée à une autre. Et ça c’est cool ! Allez TGS corrige le manque de jeux vidéos et de café et tu deviendras un jour LE festival de référence !